A la nuit tombée , d’innombrables éphémères s’agitent désespérément autour de la lumière du cockpit dans une danse trop courte pour ne pas être dénuée de sens. Au petit matin, jonchant le pont , elles constituent le petit déjeuner des oiseaux qui les picorent en réveillant l’équipage ,un étage plus bas .
Elles ne verront pas les résultats de la course qui opposent les catamarans Daphi et Madgic . Bien sûr, il ne s’agit pas encore d’une course au large
( c’est malin… j’en entends qui ricane ).
Comme deux bébés tortues , les deux catamarans essaient de rejoindre la mer et de déjouer les obstacles techniques. Madgic , antifouling « azul » , mis à l’eau plus tôt semblait disposer d’un avantage certain . Mais Daphi , coques blanches antifouling rouge , revient très fort et semble prêt à coiffer Madgic sur le piquet du ponton. Mais un ultime ennui remet les 2 bateaux à égalité ; chacun espérant bien incorporer la troisième vague de bateaux qui va quitter le Rio Dulce début février après celles de décembre et janvier.
Entretemps, l’équipage de Madgic se sent pousser des racines et se verrait bien , dans ces temps d’immobilisme forcé , troquer sa vie de « nomade » maritime pour celle de propriétaire terrien guatémaltèque . A quelques kilomètres de Fronteras , le 4X4 de nos hôtes traversent l’aldea de DSan Antonio de Seja puis grimpent avec précaution le chemin chaotique qui mène à leur eden. Au bout d’une allé de cocotiers, une bâtisse au sommet d’une butte dégagée offre une vue époustouflante sur un panorama vallonné et verdoyant .
Plus bas, un petit rio coule paisiblement, en cette saison, au fond de la propriété.
Les bougainvilliers flamboyants ornent les alentours. Une quiétude et une sérénité se dégagent des lieux .
Les bananiers s’épanouissent sans effort à travers la propriété et offrent leurs fruits .
Un programme d'Arte-Gwaté:
Le bananier n’est pas un arbre mais un herbacé .Pas de bois de banane donc.
Au bout de la branche , un bourgeon (popotte ) violacé, tête en bas laisse apparaitre ,entre chaque pétale , une main de bananes (un régime ).La branche de bananes s'allonge de plus en plus au fur et à mesure que la fleur dévoile ses mains de bananes et ainsi de suite jusqu'à ce qu'il n'y ai plus de fleurs femelles (ce sont elles qui donnent les bananes)
Le capitaine préfère la sexualité des bananes à celle des éphémères : les mâles meurent après l'accouplement l; les femelles après l'accouchement...
Ce qui ne donne pas envie d'avoir des enfants.
Puis les fleurs mâles ne produisant pas de mains , le popotte s’éloigne , sur sa tige , inexorablement des régimes et tend à toucher le sol. Il ne reste plus qu’à le couper pour que les bananes murissent et à couper le pied ,maintenant définitivement improductif pour attendre qu’un jeune pied prenne le relais.
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Au bord des eaux fraîches et limpides du rio , de grands arbres à la « peau »de couleur rouge pelant en été sont appelés par les locaux : « gringos à la playa ».
Un palmier au sommet d’une colline lointaine invite à la balade et à aller à sa rencontre. Des hauteurs , des guatémaltèques , chargés de bois descendent vers leur modeste demeure pour alimenter le foyer de la cuisine .Au point culminant , le regard se pose sur un versant boisé qui s’étend à perte de vue jusqu’au pied des reliefs .Puis , d'un mouvement de tête ,le regard embrasse ,sur l’autre versant , le plus grand lac du Guatemala : le lac Izabal.
Le Rio Dulce donne à ce lac ,de 48 km de long, un accès à la mer des Caraïbes. Au début du XVIIe siècle, les colonisateurs espagnols utilisaient cette voie d’eau pour relier l’intérieur des terres à l’océan et à l’Espagne . Les domaines autour du lago Izabal constituaient un centre d’échange commercial très important .
Les pirates anglais et hollandais l’avaient compris et remontaient , lors de leurs attaques fréquentes , le fleuve pour piller les propriétés des alentours.
L’établissement d’une place forte , à l’entrée du lac , était donc une priorité .Le Castillo de San Felipe a été construit au début du 17ème siècle pour protéger les propriétés coloniales des attaques des pirates. Pour défendre ce trafic maritime intense, le château fut le siège de nombreux combats jusqu'au 18 ème siècle.
Castillo San Felipe de Lara
Sur la trace des pirates , l’équipage de Madgic monte à bord d’une lancha et remonte le Rio Dulce sur quelques kilomètres pour atteindre le pied du fort à portée de feu des douze canons .
Le parc bien entretenu invite à parcourir les bords du Rio et du Lac .Du haut des nombreuses tours de guets, le lac Izabal dévoile ses dégradés de couleurs brumeuses.
Castillo San Felipe et lago Izabal
Petite question d’écologie ?
Les pneus peints en vert sont-ils meilleurs pour l’environnement ?
Le véritable problème pour le lac est la mine de nickel qui pollue insidieusement ses eaux.
Depuis 2002 ,les associations de défense de l’environnement tirent le signal d’alarme .En ce début d’année , le Ministerio del Ambiente reconnait la « contamination » et la prolifératIon d’algues perturbant l’écosystème .
Mais les locaux n’ont pas attendu ni les résultats des tests ni les déclarations , ils étaient déjà au courant : l’eau n’est plus aussi belle qu’avant …
Sur le chemin du retour , pélicans , cormorans et iguanes saluent avec indifférence la lancha en route vers Nanajuana Marina.