Madgic pressé de découvrir la culture Guna a repris la mer et s’insinue précautionneusement entre les récifs et la côte sous le vent de la petite île habitée d’Isla Tigre.
L’habitat est dense et précaire. Quelques bâtiments délabrés en dur jouxtent les huttes, au toit de palmes, serrées les unes contre les autres et faites de branchages verticaux.
A travers l’ouverture d’une hutte, le regard traversant aperçoit la mer.
Seul un terrain de sport arboré de quelques cocotiers apporte un peu de verdure et de perspective à la pointe de l’ile. Des ados y jouent au foot. Sur la petite plage au sable blond, des enfants se baignent avec joie.
Isla Tigre
Les ulus – pirogues traditionnelles Guna - commencent à silloner les eaux entourant Madgic .
Leur unique voile faite d’un tissu banal fait glisser avec grâce ce tronc d’arbre massif et évidé tandis que, d’une main, le barreur se sert de sa large pagaie comme d’un safran et, de l’autre, retient le cordage de la voile souvent usée voire déchirée.
Bienvenue au Guna Yala, le pays des Ulus !
Le ronronnement d’un groupe électrogène et quelques lampadaires illuminés sur l’ile annoncent le soir. L’obscurité devient rapidement complète . Les récifs qui entourent Madgic deviennent invisibles et l’emprisonnent.
Un chant rythmé et cadencé s’élève de plus en plus fort du village et parvient nettement aux oreilles de l’équipage.
Celui-ci ignore la signification de ces mélopées et commence à regretter de ne pas être descendu sur l’ile pour une petite reconnaissance et s’assurer du caractère amical des insulaires indigènes ! Les marmites sont peut-être aujourd’hui alimentées par quelques panneaux solaires …
Ayant survécu à la nuit, l’équipage se décide de descendre à terre.
Sons nocturnes à Isla Tigré
Les regards se croisent. Un Guna, dans son ulu, nous accueille d’un sourire discret. Trois enfants espiègles, sourire édentés, nous interpellent dès les premiers pas sur le sable jonché de quelques détritus .
« Bé igi be nuga » « Bé bia lidi »(*)
(*) : La traduction, pour ceux qui n’ont malheureusement pas été assidus aux cours de Gunas - 3ème langue, est la suivante : Comment t’appelles-tu ? D’où viens-tu ?
Un habitant plus âgé conduit l’équipage à l’officina administrative de l’île pour l’impuesto .
Une ancienne boulangerie et une « tienda » désœuvrée semblent avoir connu des jours meilleurs tout comme l’embarcadère. Quelques caboteurs viennent, par contre , encore s’y amarrés pour ravitailler l’île
Au centre de l’île, les huttes s’écartent pour laisser s’exprimer une petite place Des « estudientes » en uniforme de sport, rouge et blanc, jouent au volley-ball avec habilité .
La visite déconcertante de l’ile commence.
Le village , le port , le dispensaire .....
Face à la brise du large , des cochons profitent d’une villégiature toute relative. La piste de l’aéroport local est abandonnée depuis bien longtemps, semble-t-il, et mène au terrain de sport. Attablé à une table sous le auvent d’un maison carrée dans laquelle ,un groupe électrogène maintient le froid de bahuts , deux panaméens nous interpellent et nous invitent à prendre place pour profiter d’une boisson rafraichissante . Une femme guna coud et compose un mola- vêtement typique du Guna Yala ; l’ autre femme ,anneau nasal en or , winnie de perles multicolores aux chevilles , portant le mola nous apportent 2 Balboas bien fraiches .
Le sentier étroit à travers les huttes fait découvrir un habitat rudimentaire. Différentes huttes attenantes composent les différentes pièces de la maison dont le sol est en terre . Quelques fauteuils de jardin ont l’honneur de constituer le mobilier principal. Les hamacs se balancent dans les pièces à dormir.
Les enfants albinos, se déplacent rapidement dans ces corridors pour retrouver l’ombre des cases et protéger leur peau blanche dépigmentée . Ces « sibbu », « enfants de la lune » sont vénérés chez les Gunas. Ils sont particulièrement nombreux dans ce peuple qui détient le record mondial de cette maladie génétique.
L’équipage se fraye un chemin sur le sentier auquel les huttes ont laissé un peu de place. Ici et là une petite tête sort d’une hutte et sourit timidement. Les ulus de chaque famille , tirés au sec , attendent de prendre la mer pour la pêche ou simplement conduire son propriétaire « à la montagne « pour s’occuper des terres.
L’évolution de ce mode de vie apparaît comme inéluctable. Mais il est évident que les Gunas ralentissent volontairement l’avancée de la « civilisation » pour garder leurs valeurs disparues depuis longtemps ailleurs.
Par mimétisme , l'appareil photoo a décidé de prendre des clichés "sans pigments"
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